La chimio ? C'est trop rigolo ! (LH IV Bb à 22 ans)

Ma chère Sandrine,

merci pour ton message.
Je viens de lire ton témoignage et je ne me fais aucun souci pour toi. Une personne avec tant de goût, qui aime le selecto à sa juste valeur ne peut que surmonter les obstacles qui se dressent sur son chemin. Ton courage et ta persévérance restent néanmoins a saluer. Si j’ai bien compris, tu en as actuellement fini avec l’ABVD ? De même pour la radiothérapie ? En tout cas, je suis de tout cœur avec toi !

Un des plus grands ambassadeur du selecto,

Yaniss.

Quouquou.

Avant tout, je tiens à remercier ce site, ce forum et les gens qui y participent car vous m’avez beaucoup aidé et apporté. Nous devons nous serrer les coudes, nous entraider et nous soutenir les uns envers les autres et d’autant plus dans ce genre de situation. Après huit mois de chimiothérapie il est temps pour moi d’à mon tour conter mon histoire et de tendre la main à un maximum d’entre vous.

Je me prénomme Yaniss et voici mon histoire. Je vous préviens, elle est vraiment cool.

Tout commence le lendemain du confinement de mars. Ma veine cave (celle du cou cote droit) s’est gonflée. Étant jusqu’ici en excellente santé je ne m’en fais pas plus et décide de laisser quelques jours, histoire de voir si cette turgescence (terme barbare pour désigner le gonflement d’une veine) disparaît d’elle même ou non. Une semaine passe et toujours pas. De plus, pendant cette semaine je commence à vraiment galérer à respirer, surtout pendant mes petites sessions de sport en solo (je faisais les séances avec Alex et P-J, les vrais savent). Sentant qu’il y avait (dézo pour l’expression mais elle est suffisamment cool pour justifier son emploi) une couille dans le paté, j’arrive tant bien que mal à obtenir un rdv d’urgence au médecin.
Oui, parce que ce que je ne vous ai pas dit, c’est qu’en plus d’avoir choisi le pic du covid et de la panique dans le système médical français dans mon genie absolu je me suis confiné dans le nord avec ma copine: sachant que je vis habituellement dans le centre (le 41 tmtc). Bref, ayant le nez creux, je prédis que je m’embarque pour de longues et palpitantes aventures. Donc ni une, ni deux, j’attrape quelques slibards, mon chargeur de portable et un livre : l’amour au temps du choléra de Gabriel Garcia Marquez (le mekhtoub mdr) et nous voila partis pour le médecin.
Bimbadaboum, le médecin me dirige illico presto vers les urgences les plus proches. Tout contents, on y va. Et c’est la que les choses vraiment cools commencent. En effet, car à mon entrée j’ai le mauvais gout d’avoir de la température, enfin un fébricule (soit a peine 38). Quoiqu’il en soit, cela suffit pour mettre les urgentistes dans la plus grande des détresses et de me placer en section covid sur le champ (d’autant que mon scanner des poumons n’était pas bon du tout). Pendant 5 jours…5 JOURS je suis en section covid, là où on te donne de l’hydroxychloroquine (LoL) et qu’à chaque quinte de toux des patients des autres chambres, tu as l’impression que leur âme tente de s’extirper de leur corps qui ne se résume plus qu’à un tas de cellules infectées. Après des scanners réalisés juste après des covideux refusant de porter le masque, avoir été mis sous oxygène et 2 tests négatifs ; une mission d’exfiltration est opérée afin de me sortir de ce champ de bataille virologique. Une ponction de 2L de liquide pleural (oui parce que c’était à cause ça que je galérais à respirer mdr), trois hôpitaux et quatre services plus tard, je me retrouve donc au service hématologie du CHU d’Amiens. Et c’est la que j’apprends la nouvelle. Vous aussi vous êtes au bord de l’apoplexie à cause de cette tension insoutenable ? de ce crispant suspens ? Et oui, c’est là-bas, après 15 jours d’hospitalisation que j’apprends que je fais partie de ce grand groupe que j’appelle “le groupe des bogoss”: les cancéreux. On me diagnostique un LH stade IV Bb à 22 ans (et oui, j’aime pas faire les choses à moitié, quitte à avoir un cancer, autant le faire bien). C’était début avril, depuis j’ai réalisé 15 chimios d’ABVD (soit presque huit mois). Ma dernière est prévue pour mercredi prochain. Je suis en rémission complète après trois mois, à reconfirmer fin novembre après l’arrêt des traitements.

Je tiens à remercier mes proches: mon reuf, ma daronne, mon daron, mes amis, mon directeur de thèse (de stage à ce moment là), mes encadrants de master ainsi que le service d’hématologie d’Amiens et de Tours. Et sans oublier ma dulcinea, mon amour de tous les jours: miss monde ; et toute sa famille. Je tiens également à réaliser une dédicace spéciale au covid. Oui, oui : au covid… car sans lui jamais je n’aurai eu accès aussi vite à tous les examens pendant mon hospitalisation. Jamais plus je n’aurai pu faire d’enfants, car à cause d’une trop importante présence à l’hôpital je n’ai pas commencé par la chimio classique dans les cas de stade IV : el famoso BEACOPP qui rend quasi à coup sûr stérile (80-90 pourcents). Et ayant superbement bien répondu à l’abvd je ne fais finalement pas de BEACOPP. De plus, j’ai pu terminer en télé-travail mon stage de fin d’année pendant ma chimio et donc valider mon année.

Encore deux, trois trucs (qui me semblent important à dire) et promis je vous laisse trkl.
Le cancer et sa guérison s’apparentent clairement à un marathon, une course d’endurance. Et non pas à un sprint. C’est long. Il faut être patient. A chaque jour suffit sa peine. Et la réalisation de petits objectifs quotidiens permet d’avancer, de garder le rythme. Parce qu’il faut se le dire : c’est dur. Il y a des jours avec, et des jours clairement sans. Les jours avec, profitez-en à fond. De même, les médecins le disent et le savent trop peu en réalité, le sport est un traitement à part entière. Il vous aidera à tenir, à mieux gérer la fatigue et les nausées. Il améliorera les résultats de votre réponse au traitement ainsi qu’il diminuera les risques de rechutent (je n’invente rien, allez voir l’association “malade de sport”). De plus il vous redonnera une image positive de vous même, car être malade c’est pas rigolo. Par contre se sentir capable d’efforts, de bouger, de s’améliorer et de continuer à se battre cela fait beaucoup de bien au moral. Cependant il faut savoir écouter son corps. Il y a des jours pendant lesquels cela ne sert à rien de pousser. Il faut savoir se ménager parfois. Par contre, dès que cela est possible, poussez-vous à faire du sport. Ah, et baisez un max ! Ça aussi c’est sehr sehr important.
Une toute dernière chose (car j’aurai aimé le lire quand j’y ai été confronté) : pour ceux qui se demandent si on sent la chambre implantable, si elle gêne, si on peut faire du sport avec, si c’est visible etc … car moi j’avais très peur de tout ça. Et bien franchement, on ne la sent pas du tout. J’ai la peau épaisse (un vrai russe comme on n’en fait plus) donc on la voit très peu chez moi, mais cela passe vraiment inaperçu: vraiment ne vous en faites pas du tout quant à ce truc.

J’espère avoir aidé ou, du moins, diverti quelque peu certains d’entre vous avec mon histoire.
Je serai tout à fait heureux d’échanger avec ceux qui le souhaitent.
De deux choses lune, l’autre c’est le soleil (Prévert)
Gardez le moral, l’amour vaincra !

Cordialement,

le plus bogoss des cancéreux,

Yaniss.

3 « J'aime »

Bonjour,

Ton euphorie de fin de traitement fait plaisir à lire avec cette joie de vivre débordante et contagieuse :).

Félicitations pour tout ce que tu as mené de front durant cette période.

Est-ce que tu vas avoir quelques séances de radiothérapie pour prévenir la rechute après l’ABVD?

Je me permettrais d’apporter quelques nuances à ton propos pour ceux qui seraient amenés à lire ton post et qui auraient un parcours un peu différent:

  • le BEACOPP peut rendre stérile mais ça ne signifie pas que l’on ne peut plus avoir d’enfant, la procréation médicalement assistée permet de congeler le nécessaire :wink:
  • par ailleurs le sport ou plus globalement l’activité soutenue ont effectivement des effets très positifs mais il faut veiller à ce que cette activité soit adaptée (attention aux chocs qui peuvent causer des hémorragies internes en cas de baisse drastique des plaquettes). N’hésitez pas à parler de vos projets avec votre équipe médicale.

Je te souhaite le meilleur pour la suite :wink:

Salut Cassis, (que j’aime ce fruit au goût délicat et sucré)

Merci beaucoup pour ton message avant tout. Cela me fait très plaisir.
Ayant fait huit mois d’ABVD, et ayant eu une réponse complète depuis la deuxième cure,
j’échappe également à la radiothérapie. Je m’en tire vraiment bien sans rire. Surtout que je suis
conscient que tout le monde ne supporte pas aussi bien les séances de chimio que moi.

Tes remarques sont tout à fait pertinentes, merci d’apporter des précisions. Effectivement, une procréation assistée reste possible même après une BEACOPP (j’ai du congeler des spermatozoïdes avant ma première chimio au cas où). Quant au sport, tu as encore une fois raison de préciser. Étant moi même sous piqûres d’innohep quotidiennes (un fluidifiant sanguin, anti-coagulant quoi) depuis huit moi, je dois faire très attention à ne pas prendre de coup ou à m’écorcher. Donc soyez prudents et ménagez-vous tout de même.

Ton parcours à toi Cassis en revanche force le respect. Tu as du courage et je suis de tout cœur avec toi pour la suite.

Bravo pour ton courage et ton état d’esprit !
ça fait du bien de lire ta prose rigolote de bon matin :slight_smile:

Complétement d’accord pour le sport
pour ma part la pratique du VTT m’a bien aidé, j’ai rallongé les kms et difficultés progressivement.
J’ai pu refaire mon premier rallye de 35 kms cet année

bonne continuation à toi

Olivier

Salut Olivier,

Ca fait plaisir de te lire tu en es où? Tu as pu reprendre le nouveau travail que tu souhaitais?

[quote=Cassis]Salut Olivier,

Ca fait plaisir de te lire tu en es où? Tu as pu reprendre le nouveau travail que tu souhaitais?[/quote]
rien du tout niveau boulot, la situation sanitaire compliquée n’aide pas et je suis sénior donc pas très attractif sans doute…
du coup j’ai décroché depuis ce printemps et me suis un peu découragé. Ca fait déjà presque 6 ans que je suis parti de mon dernier poste ! N’étant plus indemnisé par pôle emploi je n’ai quasi plus de suivi/coaching ni via pôle emploi ni Cap emploi. Dommage car je suis sûre que je pourrais être utile quelque part mais où ?..

bon le principal c’est d’être en bonne santé et de faire des choses (sport, dessin, graphisme), dernier contrôle hémato le mois dernier RAS, le prochain en avril 2021

et toi la forme les études se passent bien ?

En tout cas ton style de narration dédramatise bien le “truc” Rube Lebogoss ;)))

Salut Olivesx,

tu n’imagines même pas à quel point cela me fait plaisir d’apprendre que mes propos font du bien.
Nos maladies sont graves, c’est indéniable. Ce n’est cependant pas une raison pour que notre vie et notre quotidien deviennent graves. Bien au contraire.
Tu vas sans doute rire et me croire fou mais toutes ces mésaventures ont été pour moi une bonne expérience. Biensur je ne souhaiterai pas, même à mon pire ennemi, de connaître les douleurs et peines que j’ai pu endurer pendant ces huit mois (qui ne sont vraiment pas grand chose comparées au parcours de certain). Néanmoins, n’est-ce pas le tribu à payer pour devenir meilleur, plus sage et apprécier encore plus la vie ? La question se pose car pour ma part je me suis beaucoup rapproché de ma famille. Je suis devenu plus attentif et soucieux des autres. Et sachant que je peux tout à fait être vulnérable, j’apprécie mieux l’instant. Enfin tout ça pour dire qu’il y a beaucoup de positif malgré tout a prendre dans ces épreuves. Après tout, “pas de repos pour les braves”.

je dirais même chose pour moi,
j’imagine même pas comme ça doit rendre humble et sage d’avoir à traverser ce genre d’épreuve à 20 ans ! une leçon d’humanité énorme !
Dommage que ça ne soit pas arrivé à de grands dirigeants de notre monde si vous voyez où se porte mon regard :wink:

quouquou z’aussi :slight_smile:
merci pour ton témoignage plein d’humour et de dédramtisation !
j 'ai également moi aussi des remerciement pour la COVID, car ce virus m 'a egalement permis une prise en charge rapide de mon LH ( mon histoire tu la trouvera dans le fofo si tu as envie !)
bref ca fait du bien car malgré toutes les epreuves aussi difficiles soient-elles, on en ressort toujours du positif !!
bien a toi et a tout les lymphomanes !
bravo a nous
Sandrine